Un marché en révolte
À Lilongwe, le marché de Tsoka, habituellement animé par le commerce de vêtements et d’accessoires, est devenu le cœur de la contestation. Steve Magombo, porte-parole des 2.000 vendeurs du marché, incarne cette révolte. En février, il a mené une marche de 5.000 commerçants jusqu’au Parlement, la plus grande manifestation dans la capitale depuis des années.
Le mouvement s’est rapidement étendu à plusieurs villes du pays, où la précarité touche près des trois quarts des 21 millions d’habitants, selon la Banque mondiale. L’inflation annuelle a atteint 30 % en février, avec une hausse vertigineuse des prix alimentaires (+38,5 %). Le sac de 50 kg de maïs, aliment de base, a presque triplé depuis décembre, atteignant 110.000 kwacha (58 euros), alors que le salaire minimum mensuel est de 48 euros.
Une économie en chute libre
Le Malawi est étranglé par une crise monétaire aggravée par la dévaluation du kwacha, qui a perdu plus de la moitié de sa valeur depuis 2022. “L’effondrement du kwacha a été catastrophique pour un pays qui dépend largement des importations”, explique James Woods, analyste politique basé au Royaume-Uni. “Cela a fait flamber l’inflation dans un cercle vicieux”.
Les entreprises malawiennes, confrontées à une pénurie de devises, peinent à importer des marchandises essentielles. En réponse, le gouvernement a interdit certains produits importés, comme la farine de maïs, le lait frais ou encore la viande. Une mesure qui peine à convaincre. “Le gouvernement semble dépourvu de solutions pour remettre l’économie sur les rails”, estime Gift Trapence, figure de la société civile et organisateur des manifestations de 2019.
Une crise politique en toile de fond
Cette crise économique survient alors que le président Lazarus Chakwera, élu en 2020 avec 58 % des voix, brigue un second mandat en septembre. Son principal adversaire, l’ancien président Peter Mutharika (85 ans), tente de faire son retour.
Dans ce climat de tensions économiques et sociales, la colère des vendeurs pourrait bien peser sur l’issue du scrutin. “Les hausses de prix sont insoutenables, et le gouvernement ne fait rien”, s’indigne Steve Magombo. Un avertissement que le pouvoir ne peut ignorer à l’approche des élections.
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